Les Charitables

Source des documents : divers, internet

 

Confrérie "Les Charitables"



Notre région ne serait pas ce qu'elle est, et particulièrement le
Pays d'Artois, et cette série de portraits croqués forcèment incomplète s'il n'était pas fait mention d'une bien étrange confrérie dont les origines se perdent dans la nuit des temps.

En l’an 1188, sous le règne de Philippe Auguste, une épidémie désastreuse ravage la région. C’est alors que deux maréchaux-ferrants, de Beuvry et Béthune, font le même rêve, ils voient Saint-Eloi qui leur commande de se rencontrer afin d’aller ensemble enterrer les morts contagieux. Nulle crainte, ils seront préservés de la maladie leur affirme Saint-Eloi : "
Le fléau n'approchera point de vous ni même de vos demeures".

              

Telle serait l’origine de la confrérie des Charitables qui, huit siècles plus tard, perpétue la tradition. Vêtus de larges capes noires, habit noir, avec cravate et gants blancs et coiffés du bicorne, les Charitables assurent bénévolement et gratuitement l'enterrement des morts de Béthune, Beuvry et de quelques communes voisines quelque soit la confession ou le rang social du défunt.

La confrérie des Charitables, même si elle s'est adaptée à notre époque, repose sur une hiérarchie, des rites et des règles formelles. Même si leur saint patron reste le grand Saint-Eloi, les
Charitables de Béthune sont laïques, repartis en Prévôt, mayeur, charitable ou confrère. Ils doivent être de réputation honorable et respecter trois mots d'ordre : Exactitude, Union et Charité.

 

    

Béthune - Confrérie de Saint-Eloi - Deux Charitables et photo prise en 1921

(Merci à Raymond pour la carte et à Marie R. pour la photo où figure son grand-père)

 

            

Texte en vieux français : les Coutumes de la Confrérie


"1- Tous les jours de l'année, hormis les quatre nataux, fe dit la Meffe par le Chapelain de la Confrerie, à laquelle affiftent les Prevofts, mayeurs & Charitables, s'ils n'ont caufe legitime : & en ce cas, ils doivent auparavant obtenir congé du prevoft.

2- pendant la Meffe s'allument fix gros cierges, & Prevofts, mayeurs & Charitables, vont à l'offrande avec une bougie ou couppon. Devant fortir de la Chapelle fe donnent les ordres, & comandements de fe touver aux fervices & enterremens, qui fe doivent faire ce jour-là.

3- Chaque Dimanche le Chapelainfait l'eau benite devant la Meffe : puis il en donne auffi à ceux qui font prefens continuant en cette façon toute la semaine.

4- le premier de Decembre, & le vingt-cinquiéme de juin, fe gardent tres-devotement tant à Bethune qu'à Breuvry, les fêtes de S.Eloy, où il y a Indulgence pleniere, depuis les premiers Vêpres jufqu'au Soleil couchant, auqeul jour le Venerable S. Sacrement y fera exposé pour la veneration du peuple. La veille fe chantent les premieres Vêpres en mufique, le lendemain dés les cinq heures du matin, s'expofent dans la chapele de la Confrerie, les reliques de leur Patron avec la fainte Chadelle, le Peuple venant de toutes parts les honnorer. A la même heure fe drefe un Autel à la porte du Prevoft, où l'on amene tous lef chevaux de la Ville, & des lieux circonvoifins, fur le front & fur la poitrinne defquels les Commis forment des Croix avec le marteau au nom de Dieu, & de S. Eloy. a fetpt heures fe commence la Meffe folemnelle par le Chapelain de la Confrerie, affifté des Pafteurs de S.Barthelemy, & de S. Vaaft. Aprés la communion du Prêtre communient pareillement les prevots, Mayeurs & Charitables, à 9 heures tous fe rendent chez le Prevots pour entendre les Lettres de l'Institution premiere de la Confrerie, qui fe lifent publiquement à tout le Peuple. De là le Prevôt depute deux mayeurs vers Meffieurs du chapître de S. barthelemy, pour les prier d'honnorer en cors la Solemnité : ce qu'ils font s'affemblans tous auprés de la Chapelle de S. Eloy, d'où ils fortent pour aller enfemble proceffionellement à S. Prix, les Chapelains de la Confrerie des Charitalbes, & de S. Nicolas ; l'un tenant en mains les reliques, & l'autre la fainte Chandelle, tous deux foûs un daix, qui eft porté par les quatre Mayeurs. Immediatement aprés vont les deux Prevots avec chacun un Cierge en main embelly de fleurs, puis les Charitables ayans des bagettes portantes aux bout des bouques : ceux-cy font fuivis du Clergé, de la Nobleffe, des Officiers du Roy, du Mzgiftrat, & d'un grand nombre de Peuple. le prieur de S. Prix revêtu d'habits sacerdofaux, les Religuex & Pafteur du Lieu viennent au devant : & aprés avoir encensé humblement les Reliques & la Fainte Chandelle, les Lettres fe lifent encore une fois par le Clerc : puis ils vont tous de compagnie alentour du jardin au Cimetiere du Soucretain, & de là en la Chapelle où fe chante la Meffe par le Prieur. Les Affiftans viennent à l'offrande : & à la fin, la Proceffion s'en retourne à S. Eloy, ou fe chante un motet, pendant lequel, pendant lequel les Charitables, le Chapître, les religieux, les Magiftrats & autres, vont baifer les relqieus & la Fainte Chandelle.

5- le premier de Decembre, il fe fait prefque une femblable Proceffion alentour du marché, ou les même perfonnes fe trouvent, & en même ordre.

6- le dernier d'Aoult fe folemnize la Fête des reliques de S. Eloy, en memoire qu'à tel jour le gros Os du bras du fufdit Saint fut mis en fa Chapelle. Les Charitables le portent à S. barthelemy : & de là accompagnez des Chanoines, le rapportent proceffionnellement en font lieu ordinaire.

7- Il en eft d'autres extraordinaires qui fe font volontairement par les Charitables, felon l'exigence des neccffitez publques, comme eft celle qui le fait annuellement le jour de S. Mathieu ou de S. Luc & Plifieurs autres qui fe font encore lors de la guerre, la Pefte, les longues pluyes, où la fterilité affligent le pays. De vray, l'an 1615. 16 d'Aouft, le peuple étant menacé par ces trois fleaux, & particulierement affligé d'un avis commun & confentement, le Chapitre de Saint Barthelemy, le Magiftrat & Charitables s'en allerent proceffionnellement à la Chapelle de S. Eloy, prés de la fontaine de quenty, où fe rencontrerent aufi en même temps les Charitables des Beuvry & aprés que les Prévoft de part & d'autre furent entre-falüez amiablement à l'imitation des deux premiers Marefchaux Inftituteurs de la Confrerie & que le Pafteur de Beuvry eut fait fon harangue ; & que le prevoft de la Collegiale de Bethune eüt pareillement fait la fienne ; il fe vit une chofe digne d'éternelle memoire, fçavoir que par l'ordonnace de S. Eloy ayant ëté fait une Chandelle pour marque de l'amour, qui devoit à jamais ardre dans les coeurs des Charitables, elle fut divisée : la partie d'embas donnée à ceux de Béthune, & celle d'enhaut à ceux de Beuvry : venant donc à fe rencontrer, ils trouverent bon de croifer, & l'allumer à la confecration de la meffe qui fe chantera, le deux pieces de la fufdite Chandelle, ce qui n'êtoit fait encore depuis la premiere inftitution. Nötre Sauveur dit un jour que la priere de deux ou trois joints enfemble feroit infailliblement apoftillée dans le Ciel. Que ne devoit-on efperer de fix ou de fept mille perfonnes fi faintement & heureufement affemblée : l'idée & la fouvenance de la rencontre fortunée de Gautier & de Germon, & des amoureufes acollades qui s'éoient données autrefois en ce Lieu, fut fi douce, qu'elle tira les larmes des yeux de chacun. Le Ciel fembla perdre mêmes fentimens, changeant fondain fes ardeurs cuifantes en grands vents,& nuages rafraichiffants, il les ménagea toutesfois en telle forte qu'ils eurent loifir de contenter leur devotion, oyant la Meffe folemnelle, & d'achever la Proceffion qui fut suivie d'une puye abondante & defiré."

 


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